Lors de son échange avec la diaspora congolaise en Suisse, en marge de la 58ᵉ session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, la Première ministre Judith Suminwa Tuluka a fait une révélation surprenante sur l’utilisation actuelle du Go-Pass. Selon elle, « tout ce qui est payé au Go-Pass sert à régler une dette qui a été gagée jusqu'en 2027 par le régime précédent ». Une déclaration qui relance le débat sur la gestion de cette taxe et son impact réel sur les infrastructures aéroportuaires en République démocratique du Congo.
Une taxe initialement destinée aux aéroports
Instauré sous le régime de Joseph Kabila, le Go-Pass, officiellement appelé redevance de Développement des Infrastructures Aéroportuaires (IDF), visait à financer la modernisation des aéroports congolais. Avec des infrastructures vétustes et à l’origine de nombreux crashs d’avions, le gouvernement avait décidé d’instaurer cette taxe pour améliorer les équipements et garantir une meilleure sécurité aérienne.
Son tarif est fixé à 50 dollars pour les passagers des vols internationaux et 10 dollars pour les vols nationaux. La collecte de cette taxe relève d’un contrat d’assistance signé entre le gouvernement congolais et le groupement KPMG-ADPI.
Cependant, près de deux décennies après sa mise en place, la majorité des aéroports du pays restent loin des standards internationaux, alors que la perception du Go-Pass se poursuit sans interruption.
Une taxe désormais dédiée au remboursement d’une dette
D’après Judith SUMINWA, l’intégralité des fonds collectés via le Go-Pass sert actuellement à rembourser une dette contractée par le régime précédent. Cette dette, gagée jusqu’en 2027, oblige l’État congolais à continuer de percevoir cette taxe pour honorer ses engagements.
La Première ministre justifie cette situation par le principe de continuité de l’État, qui impose au régime actuel de respecter les engagements financiers contractés par ses prédécesseurs.
Opacité et manque de résultats concrets
Cette révélation soulève plusieurs interrogations :
1. Pourquoi les aéroports du pays restent-ils dans un état de délabrement avancé malgré la perception continue du Go-Pass?
2. Y a-t-il un audit détaillé sur l’utilisation des fonds collectés depuis la mise en place de cette taxe?
3. Quelle est la part exacte de la collecte dédiée au remboursement de la dette par rapport aux investissements dans les infrastructures ?
Le manque de modernisation des aéroports congolais, malgré les centaines de millions de dollars générés par le Go-Pass, alimente un profond scepticisme. Cette taxe, censée améliorer les infrastructures, semble aujourd’hui être un simple levier de remboursement de dettes sans impact visible sur les services aéroportuaires.
Quelles perspectives après 2027 ?
Une autre question essentielle se pose : Que se passera-t-il après 2027? Le Go-Pass continuera-t-il d’être perçu une fois la dette remboursée ? Si oui, cette fois-ci sera-t-il réellement investi dans la modernisation des aéroports ?
La population congolaise et les usagers des aéroports attendent des réponses claires et des actions concrètes. Une réforme du système de perception et de gestion de cette taxe devient une nécessité, pour éviter qu’elle ne se transforme en une ponction financière injustifiée sans retombées palpables sur le secteur aérien congolais.
En attendant, les passagers continuent de payer une taxe dont l’impact sur les infrastructures reste invisible, alors que les aéroports congolais peinent à répondre aux exigences de sécurité et de modernité.
Ali Haddad